Collection

Contrairement à l’idée reçue qui fait de lui le précurseur des avant-gardes du XXe siècle, Baudelaire fut à la fois moderne et antimoderne. On l’éprouve ici devant certaines nouveautés qui l’obsédèrent : la presse, la photographie, la ville et l’art. C’étaient diverses facettes d’une même « chose moderne », fuyante et contradictoire, à laquelle il donna le nom de modernité. Le poète allie devant elles l’horreur et l’extase : les journaux à grand tirage le dégoûtent, mais il assiège ces « canailles » de directeurs pour qu’ils le publient ; il attaque la photographie, mais il pose pour des clichés de légende. Cette ambivalence constitue la toile de fond du Spleen de Paris, sommet des contradictions du dernier Baudelaire, véritable objecteur de la conscience moderne. Un Baudelaire insoupçonné autant qu’irréductible.

Antoine Compagnon est professeur de littérature française au Collège de France et à l’université Columbia de New York. Il a notamment publié Proust entre deux siècles (1989), Les Antimodernes (2005), Un été avec Montaigne et Une question de discipline (2013).

Baudelaire : L’irréductible, Antoigne Compagnon, Flammarion, 10/2014, 334 pages